STADE DU RAY
1927 - 2013
Journal intime d'un supporter niçois
229
pages. 130 photographies couleur / noir & blanc.
Ce
livre n'est plus disponible à la vente.
"Voilà
plus de quarante ans que tu fais partie de ma vie, toi qui naquis un après-midi
pluvieux de janvier 1927. À tes côtés, j’ai connu la joie, l’exaltation,
l’allégresse et parfois même l’ivresse. J’ai ressenti la peine, la déception,
l’amertume et parfois même la colère. Tu m’as donné toutes les émotions qu’un
homme peut éprouver. C’est certainement la raison pour laquelle je t’ai tant
aimé. Entre tes bras, tu m’as offert des moments d’échange rares avec ces amis
qui m’ont accompagné tout au long de ma vie. Amis d’enfance, d’adolescence,
d’aujourd’hui. Des amis proches ou simplement, des amis d’un soir. Tu savais
tellement rapprocher ceux et celles qui te fréquentaient ! Avant moi, tu
avais déjà conquis mon père. Je t’ai même présenté à celle qui deviendra ma
femme. Dans les moments difficiles, ta simple vue savait me remonter le
moral.
Ce
soir, tu nous quittes pour le grand voyage. Tu te doutais bien que je n’allais
pas te laisser partir comme ça. Bien sûr, je serai présent, comme tous ceux qui
t’ont aimé. Il n’y aura probablement pas assez de places pour t’adresser cet
ultime adieu. J’en suis certain. Comme d’habitude, je me préparerai. Mon
maillot, mon écharpe, ma casquette. Je rejoindrai le quartier du Ray, celui qui
m’a vu grandir. Une dernière fois, je passerai par la place Fontaine du Temple,
le boulevard Gorbella, puis la rue Ernest Lairolle pour rejoindre ma place en
tribune populaire. Tout au long de mon trajet défileront les souvenirs que tu
nous as laissés. Ta naissance, ta croissance, ton record d’affluence, les
titres de champions et les coupes de France, les victoires contre le Real
Madrid et Barcelone, la folie des barrages et d’autres souvenirs, plus récents
ou plus personnels. Je me souviendrai aussi des joueurs d’exception qui ont caressé
avec affection ta pelouse : Gonzalez, Nurenberg, Ujlaki, Loubet,
Ericksson, Van Dijk, Huck, Jouve, Bjekovic, Guillou, Bravo… Puis, tout au long
de cette dernière soirée, je t’accompagnerai le cœur serré. Je voudrais que tes
funérailles soient à l’image de ce que tu as été tout au long de ces 86
années : généreux, chaleureux, coloré, bouillant, colérique, révolté,
rassembleur et par-dessus tout, profondément nissart.
Une
fois que tu seras définitivement parti, je voudrais que les générations futures
sachent ce que tu nous as apporté et ce que tu as représenté pour de nombreux
niçois. Alors, pour laisser une trace de ton histoire et de celle d’un
supporter à qui tu manques déjà, je coucherai sur le papier le récit de cette
soirée et j’en rassemblerai les feuillets dans ce livre."
Adiéou
paure amic !
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Sommaire
Enfant
du Ray
[Avant-propos]
1
– Le premier
jour
2
– Un stade, mille
visages
3
– Guerres de
succession
4
– Lorsque le Ray était
Roi
5
– Le Real, Vic et les
autres…
6
– Si le Barça m’était
conté
7
– Arbitre : Monsieur Robert
Wurtz
8 – Le jour où Nice accrocha Bastia à son
sapin
9 – Sept buts dans la
musette
10 – La mémoire de
Jules
11 – Le festival de
Robby
12 – La
renaissance
13 – Un match en
populaire
14 – La plus belle de nos
victoires
15 – Funérailles au
Ray
16 – Tenue de
soirée
17 – Miracles
d’octobre
18 – La cabane du
journaliste
19 – Une saison
d’enfer
20 – Adiéou
Europa
21 – Le dernier
jour
Nous étions formidables
[Épilogue]
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Extrait 1
Chapitre 2 - Un stade, mille visages
Autant l’avouer immédiatement, engager des recherches sur la vie
plus ou moins dissolue du stade du Ray nécessite la patience de Colombo, la
minutie d’Hercule Poirot et la force de persuasion de Thomas Magnum. Durant
l'enfance et l'adolescence du Ray, voire même à son âge adulte, la
médiatisation du football était loin d’être ce qu’elle est de nos jours et les
moyens techniques, notamment photographiques, relevaient de la préhistoire…
Inutile donc de taper « Stade du Ray 1935 » sur le clavier en espérant
voir YouTube vous proposer des pages de vidéos de matchs ou
des Insides réalisés par les groupes d’Ultras de l’époque.
Sur la base de ce bien triste constat, il ne me reste que deux
solutions. D’abord, me ruiner les yeux à parcourir les centaines de microfilms
des archives départementales afin de visionner les journaux de l’époque et
d’hurler de joie dès lors que je tombe, environ une fois par heure, sur un
article évoquant le stade du Ray. Ensuite, harceler Michel Oreggia, historien
du Gym et, par extension, de son stade, afin qu’il me fournisse les
informations indispensables pour agrémenter cet ouvrage d’informations fiables
et cohérentes. Ne reculant devant aucun sacrifice pour honorer la mémoire de
mon amour de Ray, je mets en œuvre les deux solutions, simultanément, pour le
résultat qui suit.
Les quelques photos et articles de presse le prouvent, le football
d’avant-guerre à Nice ne mobilisait pas plus de trois à quatre mille personnes
chaque week-end. Mais que pouvaient-ils bien faire d’autre ? On peut se le
demander mais manifestement, ce n’est pas le sujet.
Il est nécessaire d’avoir une certaine capacité d’imagination pour
se rendre compte de la manière dont on vivait le football au stade de
Saint-Maurice, puisque c’est ainsi qu’on l’appelait. À chaque fois que je
consulte les documents photographiques ou cinématographiques d’époque, ils me
donnent le sentiment, très difficile à dissiper, que le monde était noir et
blanc et que tout le monde se déplaçait très vite.
En 1936, de nouveaux travaux permettent au Ray de gagner 500
places et, surtout, de se couvrir de deux nouveaux toits situés sur les
tribunes Est et Sud. La BSN appréciera…
Alors que je consulte les archives de la sympathique période
1939/1945, j’en apprends de bien belles sur les préoccupations de certains de
nos concitoyens durant la deuxième guerre mondiale. La lecture des livres
d’histoire dont nous abreuve l’éducation nationale trace un portrait
parfaitement lugubre de la manière dont on pouvait vivre pendant cette satanée
guerre. Il faut croire que Nice n’était pas précisément au centre des combats.
Tout d’abord, on apprend que les matchs de championnat, appelé
« Championnat de Guerre », ont continué largement au-delà de la
déclaration de guerre de 1939… D’autre part, entre 1942 et 1944, la mairie de
Nice n’aura jamais été aussi fertile en idées et en projets de stades !
Parmi les plus surprenants, un projet pharaonique dont la
superficie couvrait quasiment la moitié de la superficie de Nice
Nord. Il incluait des gymnases, des terrains de basket et de tennis ainsi qu’un
terrain de football pouvant accueillir… 60 000 spectateurs ! Que l’on
décore et que l’on rembauche à la Mairie le concepteur de ce projet, s’il est
encore vivant ! À côté de cette idée géniale d’ambition et de grandeur,
l’Allianz Riviera ferait presque de la peine avec ses ridicules 35 000
places.
...
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Extrait 2
Chapitre 10 - La mémoire de Jules
En ce mois de mai 1988, l’été met déjà le nez à la fenêtre. Sur
mon Peugeot 103, je descends l’avenue Jean Médecin du haut de mes dix-huit
ans, les écouteurs de mon walkman à cassette sur les oreilles pour écouter en
boucle les tubes de Gold. Je gare ma mobylette sur le trottoir, devant le
magasin Bouchara, spécialiste de tissus en tous genres. À la vendeuse, je demande
deux mètres de tissu satiné noir et un mètre de tissu rouge. « C’est pour
faire un drapeau de l’OGC Nice ? Mon fils, lui aussi, en a fabriqué
un ! » me confie-t-elle. Mon achat en poche, je remonte vers le Ray
et confie à ma mère la lourde responsabilité de confectionner l’étendard.
Pendant ce temps-là, je file place Saint-Sylvestre pour rendre visite au
droguiste du coin de la rue qui me fournira un long tuyau en plastique gris
ainsi qu’un rouleau de scotch noir. Le soir-même, je m’enferme dans
ma chambre et m’atèle à la réalisation de mon drapeau.
Cette saison, l’OGC Nice me fait rêver. Nenad Bjekovic, buteur des
années fastes, est revenu au bercail en tant qu’entraîneur pour prendre la
succession du laborieux et morne Jean Sérafin. Avec Bjeko, l’espoir renaît,
d’autant plus qu’il annonce ouvertement son objectif de faire revivre de
nouvelles heures de gloire au Gym. En provenance du Partizan de Belgrade, il a
emmené deux joueurs dans ses valises: Marco Elsner, défenseur central et Milos
Djelmas, attaquant inclassable. Ces deux recrues viennent renforcer un effectif
qui ne manque pas de qualité avec, notamment, Daniel Bravo, Éric Guérit, Roger
Ricort, Thierry Oleksiak, Philippe N’Dioro, Tony Kurbos et Pierre Dréossi.
Autant le dire, on attendait de cette équipe qu’elle casse la baraque dès
l’entame du championnat…
Le premier match et la première sévère défaite à Toulon (4-1) nous
fait l’effet d’une douche froide. La suite n’est guère plus réjouissante,
l’équipe donnant le sentiment de produire du beau jeu (parfois) sans parvenir à
faire preuve d’efficacité (souvent). Aussi, à mi-parcours du championnat, nous
de décollons pas de la deuxième moitié du classement, occupant une peu
glorieuse treizième place, à deux petits points du premier reléguable, le PSG.
Le rêve s’annonçait doré, il commence sérieusement à roussir.
Puis Jules est arrivé, en provenance d’un club, le PSG, où il
avait été considéré comme ingérable et définitivement hors du coup. Quelques
années auparavant, il avait pourtant été irrésistible avec le FC Metz, empilant
23 buts pour 32 matchs joués. Son premier match au Ray restera gravé à jamais
dans ma mémoire. J’étais assis sur les marches de la populaire, à bavasser avec
mes voisins, lorsqu’il reçut la balle là, juste devant moi, pour sa première
action. Face à deux défenseurs, il ne s’embarrassa pas de gestes techniques
inutiles. Il poussa le ballon droit devant lui et emporta tout sur son passage,
comme un ouragan. Une percée qui réveilla, à elle seule, tout le Ray ! Son
style de jeu était tout simplement unique. Sa capacité à exploser les défenses
adverses relança le Gym et redonna de la joie au public niçois. Le vrai Jules
était de retour et le Ray allait se régaler !
Il faudra néanmoins patienter quelques mois avant de voir les
aiglons reprendre leur envol. À la veille de recevoir l’Olympique de Marseille
pour le compte de la 28ème journée de championnat, le Gym est
classé en 17ème position, à deux points du premier reléguable,
Brest. C’est probablement la brillante victoire au Ray contre Marseille (3-1),
grâce à des buts signés Elsner, N’Dioro et… Bocandé, qui permit à l’équipe de
se remettre sur de bons rails et de se mettre rapidement à l’abri de la
relégation. Mais, en ce mardi 31 mai 1988, jour de confection de mon
drapeau, l’essentiel est ailleurs…
Si le championnat ne nous créé que des soucis, la Coupe de France
nous sourit. Au mois de mars, nous sommes allés chercher la qualification à
Bastia contre le Gazélec d’Ajaccio en 32ème de finale grâce à
un but de Carlos Curbelo. Puis c’est au Ray que nous avons franchi l’obstacle
monégasque, pourtant futur champion de France cette saison-là. Après un match
nul à Monaco (1-1), nous battrons l’équipe du Prince grâce à deux buts inscrits
par Daniel Bravo et Philippe N’Dioro.
Dès lors, les ambitions niçoises dans cette coupe de France ne
sont plus cachées. Pour tout dire, tout le monde commence à y croire !
D’autant plus que la chance nous sourit au tour suivant puisque nous venons à
bout du Toulouse de Beto Marcico aux tirs au but, les deux matchs aller et
retour s’étant soldés par le même score (1-1). Lors du match retour au Ray,
Jules inscrit le seul but niçois et André Amitrano fait des miracles lors des
penaltys. Les « Dé-dé ! Dé-dé ! » scandés par le Ray tout
entier sont encore bien présents dans ma mémoire.
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Extrait 3
Chapitre 21 - Le dernier jour
Dimanche 1er septembre 2013 : après avoir garé
l’automobile, je me rends sur la place du Ray, trop calme. La circulation est
fluide, le fleuriste et ses étals peinent à trouver des clients parmi les
quelques promeneurs du matin, les supermarchés sont fermés, les aiguilles de l’horloge
se sont arrêtées, comme pour figer le temps pour toujours. On doit être hors
saison. Le calme avant la tempête, peut-être. Sur les scooters, dans les
voitures, sur les trottoirs, je savoure la présence de quelques maillots rouge
et noir. Quelque chose se prépare.
Un euro et cinquante centimes dans la machine pour récupérer le
billet de tramway, une attente à l’abri d’un soleil déjà chaleureux dans un
ciel radieux et je grimpe dans la rame, direction le grand sud, place Masséna.
Une centaine de mètres plus loin, sur la gauche, j’aperçois quelques stadiers
aux T-shirts jaunes qui s’affairent autour du stade du Ray pour le parer de ses
plus beaux habits. Se doute-t-il de quelque chose ? Arrêt Gorbella, rappel
à l’ordre de Ben, poète nissart : « Penser à sourire ».
Le tramway, lui aussi, est à la peine. Il grince mais il avance, lui aussi. Pas
le choix. Bienvenue sur Borriglione et ses maisons niçoises d’époque. Du rouge
et du noir me rejoignent pour la descente en enfer. Puis la Libération nous
accueille avec son marché, ses couleurs, ses odeurs. Et avec De Gaulle, au
centre, qui marchera avec nous, lui aussi, pour l’éternité. Les niçois sont là,
parmi la foule des étrangers. Signe distinctif : rouge et noir. Arrêt
Thiers, Ben nous encourage : « Garderen lou moral ! » De
part et d’autres, d’immenses panneaux accrochés aux réverbères annoncent
l’évènement : « Li eri ! LA DER DU RAY. DERNIÈRE MONTÉE AU
RAY. Dimanche 1er septembre 13h30. DEPART PLACE MASSENA. »
Plus de deux heures avant l’heure, j’y suis déjà.
Auparavant caché rue Lépante, comme si nous devions en avoir
honte, la boutique de l’OGC Nice s’expose désormais au grand jour, place
Masséna. Inaugurée hier, j’y entre pour la première fois. Désolé pour le
retard. Du rouge et du noir partout, forcément, je m’y sens comme un aiglon
dans le ciel du Mercantour. Sur les murs, quelques grandes dates de l’histoire
du Gym avec commentaires et photos des héros. J’adore. Un endroit qui me
rappelle le musée du Liverpool FC, c’est peu dire. Les titres sont moins nombreux
et l’espace plus réduit mais l’émotion, quant à elle, est au rendez-vous.
Cent bons euros : le prix du maillot place l’OGC Nice dans le
Top 10 des prix des maillots européens. J’opte plutôt pour une écharpe en
souvenir de cette journée sur laquelle sont floqués les noms de tous les
joueurs qui ont foulé le Ray. Dans la file d’attente, je précède un dos nu
immense où sont tatouées les paroles de Nissa la Bella. Pas de
doute, tous les fadoli nissart sont là. Je croise ensuite deux
voisins de tribunes du Ray, donc de déboires niçois : Fred et Giovanni.
Fred est accompagné de son épouse, de son fils et de sa mère, tous fidèles du
Gym. Sa mère, âgée de 78 printemps, retrouve la fraîcheur de sa jeunesse à
l’idée d’assister ce soir à son premier match au Ray. Elle ne veut pas le
laisser partir sans le voir, au moins une fois, dans sa tenue de soirée.
Giovanni, quant à lui, peine à trouver le sommeil depuis quelques jours, la
faute à cette journée dont il ne sait pas si elle le fera rire ou pleurer.
« Je ne suis à Nice que depuis 2006 mais j’ai appris à aimer ce stade. Il
me rappelle celui de Palerme où j’allais voir les matchs avec mon père,
aujourd’hui disparu. Lorsque je suis arrivé à Nice, je ne connaissais personne.
C’est au Ray, notamment en tribunes Nord et Sud, que j’ai rencontré mes
premiers amis niçois. Ce stade m’a aidé à m’intégrer à Nice. Aujourd’hui, si
j’ai complètement adopté la culture niçoise et que j’ai le sentiment d’en faire
partie, c’est grâce à lui. »
J’embarque Giovanni pour une virée dans le vieux Nice tout proche.
Nous nous baladons dans les ruelles envahies de supporters niçois, une vision
qui nous donne le sentiment d’être en déplacement avec notre équipe chérie et
de visiter la ville qui nous accueille en attendant le match. Nous nous
attablons pour déguster un morceau de pissaladière. Giovanni lorgne ensuite sur
une généreuse part de tourte de blette avant de sombrer corps et âme dans un
énorme beignet. « Je sais, c’est mauvais pour ma ligne mais je peux me le
permettre puisqu’on va beaucoup marcher tout à l’heure » justifie-t-il.
En attendant le départ du cortège - non, je n’ai pas écrit
« funéraire » - nous faisons connaissance avec quelques
passionnés du Gym. « Cvitanich a signé à la Roma, c’est fait ! »
nous annonce Jean-Louis, « Enfin, c’est ce que tout le monde dit ! »
pondère-t-il devant notre regard étonné. Son acolyte, Pierre, nous livre sa
source : « J’ai discuté tout à l’heure avec le beau-frère du
président Rivère mais il n’a rien confirmé… » On échange, on partage, on
reprend les rumeurs en les assénant comme des vérités, tout le monde connaît
tout le monde… Bienvenue dans le petit monde du Gym. Jean-Louis se déclare
fidèle du Ray depuis 1972 et n’a pas manqué un seul match, lui qui habite
pourtant à Mandelieu. Quant à Jean, porteur d’un maillot floqué au nom
d’Ujlaki, il suit l’équipe depuis 1952. Et lorsqu’on lui demande ce qu’il
ressent à l’idée de quitter le Ray, il répond, des trémolos dans la voix :
« Aujourd’hui, je vais dire adieu à un vieil ami. »
Nous regagnons le début de l’avenue Jean Médecin où des milliers
de niçois sont déjà en attente du départ. Jeunes, vieux, enfants et familles
sont rassemblés pour rendre un dernier hommage au Ray. Chacun a ressorti son
vieux maillot du Gym pour l’occasion, rappelant ainsi des noms évocateurs de
différentes périodes de la vie du stade. Pamarot, Pitau, Gagnier, Civelli,
Aulanier, Meslin, Monzon, Firoud, Scotto, Bosetti, Apam, Rémy, Ben Saada,
Hellebuyck, Echouafni, Eysseric, Cvitanich, Bigné, Bellion, Kanté, Bisconti,
Laslande, Salimi, Koné, Digard et Ederson faisaient ainsi partie de la fête.
Devant moi, quelques gros balaises, le crâne rasé et le torse nu tatoué de
messages d’amour pour le comté, trinquent, la cannette à la main, à la santé du
Ray. Plus loin, on sabre le champagne en arrosant copieusement les voisins
ravis par ces bulles de fraîcheur, le soleil nous tapant avec générosité sur la
tête. Le temps passe et le cortège n’est toujours parti, provoquant
l’inquiétude de Giovanni : « Tu crois qu’on va arriver à temps pour le
match ? » Je suis perdu dans mes pensées, tout heureux de voir le
peuple niçois prendre possession de sa ville et de porter avec fierté ses
couleurs. Je me dis même que nous aurions dû faire de cette marche une habitude
lors de chaque match au Ray.
...